Vers une hypericonisation de nos sociétés?

Shot Sage Blue Marilyn a été vendu aux enchères pour 195 millions de dollars chez Christie’s. Un record pour une œuvre du XXe siècle. Le portrait de Marilyn Monroe par Andy Warhol, c’est la rencontre de deux mythes, deux icônes de la pop culture. Et cette double symbolique, devenue objet d’absolue convoitise, n’est pas étrangère au besoin croissant de nos sociétés de développer des référents, des langages immédiatement compréhensibles, des images fortes, stables, rassurantes.

Marilyn est l’icône de la femme totale, puissante et fragile, lumineuse et sombre, féministe et sexy. Andy Warhol, lui, incarne les traits d’un artiste absolu, à la fois mortel et immortel, fasciné par les idoles qu’il transforme en icônes éternelles. Les records enregistrés récemment aux enchères sont une suite de ventes à la symbolique forte. Le 4 mai dernier, sur une plateforme digitale, la montre vintage Cartier Crash de 1967 battait un record, à plus de 1,5 million d’euros, doublant son précédent prix de vente pour une pièce similaire de 1970 vendue par Sotheby’s à plus de 800 000 dollars. La montre, que certains relient à la célèbre toile de Salvador Dali La Persistance de la Mémoire peinte en 1931 – une mise en scène des idées universelles du temps et de la mort -, c’est aussi un objet à la symbolique forte. Pour d’autres, le garde-temps créé par Jean-Jacques Cartier à la fin des années 60 serait né de deux autres hypothétiques inspirations, dont celle d’être l’emblématique montre des swinging 60s à Londres, une ère de changement social sans précédent.

Une montre qui symbolise la rébellion? Son attrait ferait-il alors écho à celle de nos sociétés post-modernes? Les référents au passé sont nombreux dans la rhétorique actuelle. Images, postures, tout est bon pour iconiser l’histoire en marche. Mais il ne faut pas s’y tromper: là où la caricature dérange, l’icône rassure. L’hyper-iconisation est bien là.