Les JO de Paris 2024: pourquoi le luxe investit massivement (Partie 1)
Jusque très récemment, les Jeux olympiques et le luxe n’avaient jamais vraiment fait bon ménage. Aujourd’hui, on ne compte plus les marques, de Dior à Louis Vuitton, en passant par Chaumet et l’historique chronométreur officiel Omega, qui se disputent les anneaux. Explications.
Ce sera probablement le spectacle le plus regardé de l’histoire de la télévision, de l’histoire des jeux
Antoine Arnault, Image & Environnement LVMH
Avec près de 3 milliards de téléspectateurs et visionnages attendus, les Jeux sont un moment privilégié pour les grandes marques qui entendent parler au monde, un rendez-vous que les plus grandes maisons ne peuvent pas manquer. Jusqu’ici, les marques engagées aux côtés du CIO ou des Comités d’organisation des Jeux, vendaient plutôt des bières et des T-shirts que des produits de luxe. À quelques exceptions près. Dont Omega, marque du groupe Swatch, chronométreur officiel des JO depuis 1932. Elle est liée par un accord avec le CIO jusqu’en 2032. Armani avait déjà fourni des tenues officielles pour l’équipe d’Italie, notamment en 2012 à Londres, Stella McCartney avait officié pour son équipe nationale, et Ralph Lauren est l’équipementier de l’équipe olympique américaine depuis vingt-cinq ans.
150 millions investis par LVMH
Paris 2024 ne peut pas octroyer des privilèges à ses partenaires, fussent-ils prestigieux comme LVMH, qui viennent marcher sur les platebandes des sponsors historiques du CIO, avec notamment Omega dans l’horlogerie
Un porte-parole de LVMH
Qu’est-ce qui a changé et pourquoi LVMH a-t-il signé, après plus de quatre ans de négociations, un chèque de 150 millions d’euros afin que le groupe de luxe devienne partenaire «premium» des JO de Paris 2024, au même rang qu’Accor ou que Carrefour? La négociation du contrat a longuement occupé Tony Estanguet, le président de Paris 2024, ses équipes et celles de LVMH. «Certains assurent que le groupe de luxe a cherché à diminuer la facture, mais ce n’est pas du tout le cas», explique un porte-parole du groupe. LVMH a négocié pied à pied les contreparties, les droits et les activations, tout comme ce qu’il a le droit de faire, de dire et de communiquer. «La difficulté, confie un proche du comité d’organisation, c’est que Paris 2024 ne peut pas octroyer des privilèges à ses partenaires, fussent-ils prestigieux comme LVMH, qui viennent marcher sur les platebandes des sponsors historiques du CIO, avec notamment Omega dans l’horlogerie.» Le territoire d’expression des partenaires olympiques est en effet strictement maintenu dans un «couloir de nage». Pour rassurer LVMH, Thomas Bach, le tout puissant président du CIO, a même fait le déplacement à Paris à plusieurs reprises, notamment pour la signature définitive de l’accord, le 26 juillet 2023. «Quel grand moment de réussite pour Paris 2024! Aujourd’hui est une étape fondamentale», avait alors déclaré Tony Estanguet, qui s’assurait avec le géant du luxe, de boucler le volet partenariats privés de son budget.
Selon de bons connaisseurs du dossier, cette opération est surtout l’œuvre d’Antoine Arnault. Fils de son père, chargé de la communication et de l’image du groupe, il a été le premier à investir l’univers des sports populaires, notamment avec la Coupe du Monde de Football, alors qu’il était chargé de la communication de Louis Vuitton en 2010. Depuis quinze ans, en coulisses, il œuvre pour le rapprochement du monde du sport et du groupe familial, ce qui n’était pas gagné d’avance, loin de là. Son père, quoique fan de tennis, s’est toujours tenu professionnellement à l’écart du sport, à l’exception de la voile pour Louis Vuitton.
Avec cet accord, Sephora devient le mécène du relais de la Flamme, Chaumet, le joaillier de la place Vendôme dessine les médailles olympiques et paralympiques, Moët Hennessy rafraîchira les VIP de ses vins, champagnes et cognacs, sans oublier Louis Vuitton qui emballe et présente les médailles. Dior jouera un rôle créatif dans la cérémonie d’ouverture qui a fait l’objet d’âpres négociations. Berluti habillera les athlètes de l’équipe de France olympique. Ce genre de partenariat est inédit pour le géant du luxe. D’ailleurs, en présentant les résultats de son groupe fin janvier, Bernard Arnault a annoncé «une année exceptionnelle en raison des jeux 2024».
Aujourd’hui, si des groupes comme le sien s’intéressent aux JO, c’est parce que son chiffre d’affaires de plus de 85 milliards d’euros, devenu colossal, s’effectue à 92% à l’étranger et que les fabuleuses audiences des JO (une personne sur deux sera exposée aux contenus TV ou en ligne) attirent ses marques devenues plus globales et internationales que jamais. Les JO sont également l’évènement de tous les superlatifs. Plus importante audience TV au monde, tous secteurs confondus: «Ce sera probablement le spectacle le plus regardé de l’histoire de la télévision, de l’histoire des jeux», a indiqué Antoine Arnault. Après la conquête des plus lointains marchés, le luxe passe désormais par le sport. Il valorise les aspirations, les idéaux et l’art de vivre de toutes les classes moyennes visées par les marques de luxe.
Les stars du sport drainent des millions de followers
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