Le business lucratif des fournisseurs officiels de la couronne

Le point commun entre Burberry, Cartier, Fortnum & Mason, Barbour, Land Rover et Laurent Perrier? Toutes ces marques possèdent un brevet royal pour pouvoir fournir la cour ou un personnage de la famille royale. Ce statut spécial est donné à des entreprises qui fournissent régulièrement des biens ou des services à la maison royale. Une fois reçue cette reconnaissance, ces sociétés sont autorisées à apposer les armes royales sur leurs produits, pour leur marketing et leur communication. Une aubaine, comme l’explique Sam McCarthy, qui fournit des fruits et légumes à la cour: «Si vous pouvez atteindre ce niveau de produit et de service, alors ce que vous faites pour la royauté, vous pouvez le faire pour n’importe qui d’autre.» Le tout est très encadré, à l’image des protocoles mis en place pour les funérailles de la reine. La coutume veut que le warrant soit automatiquement révoqué à la mort du souverain.

La tradition des royal warrants remonte au XV^e siècle, mais ce n’est qu’en 1840 que la jeune reine Victoria instaure concrètement la démarche pour empêcher les impostures. Elle n’en attribua pas moins de 2000 pendant ses soixante-trois ans de règne. Aujourd’hui, une association Royal warrant holders regroupe toutes les marques concernées et veille à l’application stricte des règles. «Elle organise chaque année un dîner de gala à Buckingham, qui réunit les représentants de toutes les entreprises, souligne Thierry, un Français qui a eu l’occasion d’y participer. Un moment unique et prestigieux.» Le blason autorisé que les fournisseurs peuvent apposer sur leur produit représente le lion anglais sur la gauche, la licorne écossaise sur la droite tenant un bouclier avec les différents emblèmes des multiples régions du Royaume-Uni.

Il est généralement accompagné d’une légende au pied de la couronne qui indique quelle personne de la famille royale a accordé le warrant. Par exemple: «By appointment to Her Majesty the King.» Il est attribué pour cinq ans et peut être révisé avant expiration. Entre 20 et 40 nouveaux certificats sont attribués chaque année et autant retirés. Un retrait célèbre avait d’ailleurs marqué les esprits en 1999, celui du cigarettier Benson & Hedges: officiellement, il avait été justifié par «une évolution de la demande de la famille royale». Officieusement, la reine ne pouvait décemment voir des Britanniques mourir pour avoir consommé des produits d’un de ses fournisseurs. Rien ne sert en tout cas d’adresser un cadeau au Palais royal pour espérer arborer le précieux blason. La relation est purement commerciale, rien d’autre.