Benjamin Comar: «Nous pensons que le public est prêt pour des marques à fort caractère comme Piaget»

De la Côte-aux-Fées à la Côte d’Azur, il n’y aurait qu’un pas. Peu importe les cultures à priori antinomiques, le style et le glamour se jouent des différences et se laissent côtoyer par tous. C’est en tout cas ce que Valentin Piaget, petit-fils du fondateur Georges-Edouard Piaget (1874), avait imaginé, dès le milieu du XX^e siècle. Cette philosophie, ou mieux, ce lifestyle des années 60 allait très rapidement être adopté par Yves Piaget, son neveu. Plus de septante années plus tard, c’est au tour de Benjamin Comar de relancer l’esprit, lui qui, dans sa carrière, a travaillé longuement au contact du luxe, chez Cartier, Dunhill, S. T. Dupont, Chanel, Repossi et enfin Piaget, depuis le 1^er juin 2021. Arrivé en plein Covid, Benjamin Comar s’est d’abord attelé au repositionnement de la marque, avant de relancer la Piaget Society, cette définition maison d’un glamour incarné par ceux qui ont marqué leur temps, de Warhol à Elizabeth Taylor, de Jacqueline Onassis Kennedy à Ursula Andress. Le pari, aujourd’hui, est de retrouver cet élan qui invite ceux qui insufflent la tendance à se laisser séduire à nouveau par la marque.

Piaget célèbre ses 150 ans d’existence cette année. Quels sont, selon vous, les trois moments clés de l’histoire de la marque qui permettraient à ceux qui ne la connaissent pas d’en comprendre l’essence?

Il y a bien entendu la capacité à inventer et produire des mouvements horlogers mécaniques extraplats. Cela a débridé la créativité et le design horloger. Les manchettes, les sautoirs Piaget ont marqué l’histoire. La marque n’a jamais souhaité être cataloguée comme classique. Au contraire, avec Valentin Piaget, elle a embrassé les époques dans leurs fortes identités. Les années 60 par exemple ont été une période très joyeuse, accompagnée d’une explosion de créativité. L’ouverture d’esprit était totale, les dessinateurs sortaient des ateliers de la Côte-aux-Fées pour aller s’inspirer des défilés de mode à Paris, observer la rue, capter les dernières tendances de la capitale. Piaget dessinait ses bijoux comme un créateur de mode le ferait, pour en comprendre le tomber, l’allure. C’était unique. Piaget voulait être en adéquation avec son époque, son style. C’est pour moi un des éléments fondateurs de Piaget. Il y a bien sûr la montre Polo. En 1979, c’était la première montre à porter un vrai nom. Un modèle sport pensé comme un bijou.

À la tête de Piaget depuis le 1^er juin 2021, vous venez de passer le cap des trois ans. Si vous deviez choisir vos trois moments clés marquants dans votre lien personnel avec la marque, lesquels seraient-ils?

Ma rencontre avec Yves Piaget, sans aucun doute. À notre premier déjeuner, j’étais très ému. Il m’a raconté toute l’énergie qu’il avait mise pour en faire une marque distinctive, au patrimoine immensément créatif. Il m’a dit: «Piaget est un voyage, celui de la Côte-aux-Fées vers la Côte d’Azur.» C’est l’alliance de la précision et du glamour. Ma première visite de la manufacture a été très impactante également. Je suis arrivé à la direction de la maison en plein Covid. J’y ai découvert un esprit très déterminé, passionné et créatif. Les 150 ans de Piaget que nous célébrons cette année marquent certainement l’année la plus forte. C’est le début de l’implantation de notre stratégie.