Selon le dernier rapport Bain & Company «Rerouting the future» en collaboration avec la Fondazione Altagamma dans sa dernière mise à jour, le secteur du luxe a fortement rebondi en 2021 totalisant 288 milliards d’euros de ventes, en augmentation de 7% par rapport à 2019. L’élan semblerait se poursuivre en 2022 avec une augmentation de 13-15% à taux de change constants au premier trimestre par rapport à la même période de 2021. Les principales raisons de cette reprise plus rapide qu’espérée seraient dues à la progression des dépenses domestiques et du tourisme en Europe, l’impact du conflit russo-ukrainien sur les ventes somme toute limité à sa région, une dynamique accrue du marché américain et sud-coréen et un marché chinois qui a enregistré de très bons chiffres de vente lors du Nouvel An chinois et jusqu’au mois de mars 2022. Dans son estimation la plus pessimiste, Bain prévoit une augmentation de 5-10% des ventes pour 2022 par rapport à 2021, et un total des revenus avoisinant les 305-320 milliards d’euros.
Mais le scénario est-il si romantique que décrit et va-t-il persister dans sa courbe ascendante? En Chine, l’affaire n’est plus si rose. Après deux mois de confinement dans les principales villes, la sortie de crise sanitaire s’annonce moins glorieuse que la première. Si le fameux «revenge buying» 2020 avait ravi les marques de luxe, les premiers signaux de réouverture montrent peu d’engagement des Chinois à dépenser pour des biens qui ne sont pas de première nécessité. Dans l’article paru le 1er juin dernier sur le site de Reuters, la peur de l’incertitude marquée par la politique zero-Covid du gouvernement empêche les consommateurs de dépenser avec insouciance. La peur du lendemain domine. Même le rendez-vous très attendu du «618 Shopping Festival», le 20 juin dernier fut décevant. L’événement national qui promeut les ventes online n’a pas reproduit la ruée attendue post-confinement qui avait eu lieu en 2020 avec 40% d’augmentation. Et les chiffres des exportations de la Fédération horlogère du mois de mai parus le 21 juin ne reflètent pas encore la réouverture des magasins.
Restent les Etats-Unis pour redresser la barre des espoirs. Et dans ce cas, les chiffres horlogers de la FH du mois de mai confirment la tendance, puisque le marché a enregistré une forte hausse de 34,8% à 327 millions de francs suisses. Mais la hausse des taux d’intérêt de la Fed aura-t-elle un effet bénéfique sur l’inflation sans freiner la consommation? La chute des valeurs boursières du S&P 500 de 20% depuis le début d’année montre un état d’esprit fébrile, lié à l’inflation et la flambée des prix.
Dans d’autres secteurs, comme l’industrie automobile, il se dit en «off» que les ventes de voitures neuves de moyenne gamme seraient à l’arrêt depuis deux mois, sans lien avec la pénurie de livraison. Le cours de Stellantis, comme d’autres valeurs boursières du secteur automobile a chuté de 20% depuis le début du mois de juin. Seul le haut de gamme s’en sortirait.
En conclusion, le ralentissement des ventes qui se profile aussi pour le secteur du luxe verra en conséquence les marques les plus désirables augmenter encore leur «pricing power», déjà très marqué fin 2021 avec des hausses de 5-10% et espérer compenser ainsi la baisse des revenus.
Le luxe va devoir étoffer sa désirabilité pour espérer retrouver le «feel good factor»…
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