Géopolitique & Luxe: les conséquences de la visite de Xi Jinping

Il y a moins d’une semaine, les drapeaux français et chinois se déployaient ensemble sur l’Esplanade des Invalides à Paris, en l’honneur du Président Chinois Xi Jinping, en visite dans la capitale française. Malgré les sourires des chefs d’Etat devant les photographes de presse, les tensions suscités par cette visite étaient palpables. La Chine est un marché crucial pour les marques européennes de luxe et représente à peu près la moitié du chiffre d’affaires du secteur.  Toute tension politique extérieure  peut se traduire en formes de boycott et rétorsion sur les griffes occidentales. 

Plusieurs dossiers épineux devaient être mis sur la table: la concurrence déloyale dans le domaine des voitures électriques (les industries chinoises du secteur sont massivement soutenues par des aides étatiques et les taxes appliquées sur les voitures européennes en Chine, y compris les modèles de luxe, sont plus élevées par rapport aux taxes appliquées en Europe sur les véhicules importés), la contrefaçon, la réciprocité des règles commerciales non respectées dénoncée par les autorités européennes et le ralentissement du marché chinois qui peine à reprendre son rythme normal.

Ce qui préoccupe aujourd’hui les producteurs européens de produits haut de gamme est l’attitude des consommateurs chinois, moins enclin à acheter des biens de luxe. En effet, les mesures draconiennes prises par la Chine pour contrer l’épidémie de COVID-19 ont mis à genoux une partie de la classe moyenne. Pour eux, la prudence est de mise et les achats sur le marché de l’occasion se multiplient. Sur fond de crise économique, l’attrait exercé par les  griffes iconiques occidentales commence à s’estomper. Le cabinet Bain and Company prévoit un ralentissement du marché de luxe en Chine de plusieurs points: si en 2023 on pouvait encore enregistrer une progression des ventes de 12%,  cette année elle pourrait descendre au-dessous de 10%.

Face aux enquêtes lancées par les institutions européennes sur le marché des voitures électriques et les soupçons de concurrence déloyale, la Chine a riposté en élevant les droits de douane de façon préventive sur certains produits français, notamment certains spiritueux comme le cognac (aujourd’hui cette hausse est temporairement suspendue). L’industrie des vins français connaît donc déjà des obstacles, mais ce qui inquiète le plus les dirigeants des grands groupes c’est le futur de la cosmétique, qui représente un enjeu majeur et crucial.

En effet, si la France enregistre un déficit commercial de 46 milliards face à la Chine, le secteur de la cosmétique et des parfums est le seul à être excédentaire et  présente un bilan positif. Le bras de fer avec les autorités européennes pourrait-il compromettre la situation?

De fait, Xi Jinping,  au lieu de chercher un compromis avec l’Europe, persiste à défendre fermement la stratégie commerciale chinoise, peu importe les avertissements de la Présidente de la Commission européenne Ursula Von Der Leyen  et les préoccupations des industriels européens qui voient affluer sur le marché interne des produits subventionnés par l’Etat chinois. 

Si le dialogue avec Xi Jinping n’a pas porté les fruits espérés, la France essaie de tirer son épingle du jeu ailleurs. Ces jours-ci se tient à Versailles la 7eme édition du sommet Choose France, voué à promouvoir les investissements étrangers dans l’Hexagone. Plus de 15 milliards d’investissements, tous secteurs confondus, ont été annoncé, un chiffre record, obtenu surtout grâce aux investisseurs américains. La France, qui reste en termes de business et investissements le pays le plus attractif d’Europe, est manifestement décidé à regarder davantage vers l’Ouest.