Mode

Entre sobriété et démesure, le double langage de la haute couture, saison automne-hiver 2023-2024

Cécilia Pelloux

By Cécilia Pelloux12 juillet 2023

Du 3 au 6 juillet, les défilés haute couture ont de nouveau fait vibrer la capitale de la mode, où 32 maisons y ont révélé leur collection automne hiver 2023-2024. Une saison marquée par l’arrivée de nouveaux designers dans ce cercle très fermé et la mise à l’honneur de certains des plus beaux lieux de Paris et ses alentours, comme le Palais Garnier ou Chantilly.

Dior haute couture automne-hiver 2023-2024. Silhouette verticale, chaussures plates. Les couleurs choisies sont le blanc, le beige, l’argent, l’or clair. Au gré des looks, Maria Grazia Chiuri perpétue le culte de la déesse et réinterprète les emblèmes fondateurs de l’Antiquité (Laura Sciacovelli)

Si nous sommes à Paris, nous sommes cette fois-ci dans Paris même, sur les quais. La rue et les pavés colorés appellent à la fois de la sophistication et de la simplicité.

Virginie Viard, directrice artistique Chanel

Cette saison, certaines maisons auront choisi de magnifier l’allure désormais bien installée de la quiet luxury. C’était le cas chez Dior avec Maria Grazia Chiuri, dont le choix, éloquent, a été de se laisser guider par la citation de Christian Dior «mes robes s’inspirent des vêtements de l’Antiquité. Je garde une simplicité apparente.» Dans l’enceinte du Musée Rodin, le luxe discret avait également pris une tournure glamour. Chez Chanel, la haute couture, une fois n’est pas coutume, avait semblé devenir plus accessible, tout en respectant la volonté de créer des pièces uniques au savoir-faire exceptionnel et au style intemporel.

Démesure artistique

Avec cette ligne Dior haute couture automne-hiver 2023 2024, Maria Grazia Chiuri poursuit son idéal de la haute couture : les créations soulignent les éléments vestimentaires que l’on pourrait qualifier d’archétypes, à l’instar de la tunique, du péplum, de la cape et de l’étole (Dior)

Pour son premier défilé couture, Thom Browne a enflammé la scène du Palais Garnier. Pour célébrer le 20e anniversaire de sa maison, le créateur américain, à la tête du Council of Fashion Designers of America (CFDA) a relevé un pari difficile. Une invitation au voyage mêlant poésie et audace. Le décor déjà, donnait le ton. Sur les fauteuils cossus de l’auditorium de l’opéra, face aux invités, étaient installés quelques 2000 avatars en papier gris et blanc du célèbre designer. On y retrouvait les codes chers à Thom Brown: du gris, du tailoring et sa dose maîtrisée d’extravagance incarnés dans des looks à têtes d’oiseau ou encore du plumage. Et comme un hommage à l’immense cloche suspendue au plafond, sur le podium défilaient des mannequins portant des chapeaux extrêmement allongés.

Chez Schiaparelli, Daniel Roseberry jouait l'extravagance avec brio, et réussissait encore une fois à faire vivre l'esprit du surréalisme propre à l'histoire de la marque (Schiaparelli)

D’autres chapeaux et d’autres lieux pour le premier défilé couture de Charles de Vilmorin, qui avait investi un lieu industriel dans le deuxième arrondissent de la capitale. Il y dévoilait des chapeaux en forme de cygne, associés à des capes de grands volumes et des bombers effilochés.

Chez Schiaparelli, Daniel Roseberry jouait l’extravagance avec brio. Pour cette collection couture automne-hiver, le designer texan restituait parfaitement sa propre vision du surréalisme: des tissus luxueux en symbiose avec les coupes oversizes, et des bijoux massifs proposant d’imposantes sculptures dorées et argentées autour du cou, du bras, ou encore sur la poitrine.  

Dans le cadre magistral du Château de Chantilly, Pierpaolo Piccioli, chez Valentino a livré une démonstration magistrale du savoir-faire couture, qu’il a accompagné, lui aussi, d’accessoires très flamboyants: des boucles d’oreille ultralarges comme des lustres en cristal ou encore des coiffes de plume en forme d’auréole pour habiller les silhouettes.

Féminité et légèreté.

La collection joue avec les codes de CHANEL, la rigueur et l’asymétrie, les couleurs discrètes et les
nuances éclatantes, l’assurance et la discrétion (Chanel)

Chez Dior, Maria Grazia Chiuri souhaitait de nouveau célébrer les beautés féminines de la mythologie. La créatrice a fait défiler de longues robes minimalistes, des capes en laine écrue double-face, des robes en dentelle de soie brodées à l’aiguille. Une collection couture intemporelle pour des femmes désireuses de préserver ces trésors de savoir-faire.

Faite de contrastes et d’équilibre, la collection Haute Couture Automne-Hiver 2023/24 imaginée par
Virginie Viard brosse le portrait d’une Parisienne sensible et audacieuse (Chanel)

Chez Chanel, Virginie Viard a sublimé le mythe éternel de la Parisienne. Pour l’incarner, Vanessa Paradis en était la muse cette saison, exprimant un style sophistiqué à la fois romantique et bohème. Des silhouettes d’une grande légèreté aux cheveux lâches ou remontés en chignon sillonnaient les pavés du quai de la Conférence, certains peints en rose pour l’occasion. De jeunes femmes portaient des pantalons de taille haute en tweed, des paniers de fleurs à la main, de somptueuses dentelles de fleurs sombres, ou encore de longues robes noires d’organza d’une grande beauté. Encore et toujours, la femme Chanel reste chic, avec ce je ne sais quoi de simplicité absolue.

Enfin, chez Alaia, Peter Mulier – aux commandes de la maison de couture depuis deux ans – magnifiait les femmes sensuelles. Les courbes féminines étaient très soulignées, les robes ajustées comme des corsets et les visages lovés dans des capuches. Le couturier jouait sur la transparence des matières, comme les lingeries apparentes. Les mannequins Irina Shayk et Vittoria Ceretti, icônes de l’ultraféminité, étaient là pour fouler la passerelle piétonne Léopold Sédar Senghor, suspendues au-dessus de la Seine.

Chez Alaïa, les courbes féminines étaient très soulignées, les robes ajustées comme des corsets et les visages lovés dans des capuches (Alaia)

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