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Les sanctions et l’inflation vont-elles peser sur le marché des pierres précieuses?

Cristina D’Agostino

By Cristina D’Agostino04 octobre 2022

Le boycott des diamants du Russe Alrosa en avril dernier avait freiné les activités du deuxième plus gros producteur au monde. Les prochaines sanctions demandées par l’Union européenne contre les diamants russes, ainsi que l’inflation qui touche les plus gros marchés importateurs du secteur vont-elles provoquer une chute des prix? Analyse.

De Beers, Alrosa et Catoca sont les trois principaux producteurs dans le commerce du diamant brut (DR)

4,83 Mrd $

Le chiffre d'affaires de De Beers en 2021

3,98 Mrd $

Le chiffre d'affaires d'Alrosa en 2021

72,4%

Le volume de production de diamants des deux plus gros acteurs que sont De Beers et Alrosa

En 2021, Alrosa avait produit 32,4 millions de carats, pour des ventes estimées à plus de 4 milliards de dollars. Cela représentait 90% de la production russe et 37,9% du marché de la production mondiale de diamants bruts. À la tête de l’entreprise, Sergei Ivanov, dont le père est un proche de Poutine depuis le temps où ils travaillaient ensemble au KGB, est aujourd’hui sur la liste des sociétés sous sanction. Pourtant, des pays n’appliquant pas ces mesures continuent à importer des diamants de Russie, et Alrosa a tout de même pu écouler une partie de sa production vers les pays du Golfe, l’Inde et la Chine.

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Les grands producteurs de diamants en pleine croissance

Depuis les sanctions, Alrosa peut moins vendre, mais il peut continuer à le faire dans des pays où les sanctions ne sont pas appliquées

Elke Berr, gemmologue et grossiste en pierres précieuses de la place genevoise

Elke Berr, gemmologue, grossiste en pierres précieuses de la place genevoise, consultante auprès de banques et ambassadrice de la plateforme Gembridge (DR)

À l’échelle mondiale, le commerce du diamant brut est alimenté principalement par trois gros producteurs de diamants, les sociétés De Beers, Alrosa et l’Angolais Catoca. La société De Beers, détenue à 85% par la holding britannique Anglo American plc est leader en valeur, puisqu’elle a atteint le chiffre record de 4,83 milliards de dollars avec 34,5% des volumes produits en 2021. Le Russe Alrosa, premier en volume avec 37,9% de la production mondiale (45,5 millions de carats) pointe à la deuxième place en valeur avec 28,4% à 3,98 milliards de dollars de chiffre d’affaires. Suivent Catoca société détentrice de la quatrième plus grosse mine au monde, avec 7% de la production mondiale, le groupe minier multinational anglo-australien Rio Tinto avec 3% (la production de Rio Tinto a sensiblement baissé en 2021), Petra 3% et Gem Diamonds 0,1%. Les six producteurs représentent à eux seuls, un peu moins de 80% de la production mondiale de diamants dans le monde, selon la plateforme spécialisée Edhan Golan. Cinq mois après l’initiative du boycott par certains pays à l’encontre d’Alrosa, quel est l’impact sur le secteur?

Le volume que ne vend pas Alrosa représente au maximum entre 10% et 15%, un volume que De Beers a rapidement contrebalancé (...) Les sanctions n’ont donc pas trop d’impact sur le marché et le prix des diamants.»

Elke Berr, gemmologue et grossiste en pierres précieuses de la place genevoise

Pour Elke Berr, gemmologue, grossiste en pierres précieuses de la place genevoise, consultante auprès de banques et ambassadrice de la plateforme Gembridge : «Alrosa est un grand acteur du marché, puisqu’il représente près de 38% de la production. Depuis les sanctions, il peut moins vendre, c’est un fait, mais il peut continuer à le faire dans des pays où les sanctions ne sont pas appliquées, comme l’Inde, la Turquie, etc. On ne peut donc pas dire que le marché est en pénurie de diamants. Le volume que ne vend pas Alrosa représente au maximum entre 10% et 15%, un volume que De Beers a rapidement contrebalancé, puisque le leader du diamant a augmenté sa production en conséquence. Les sanctions n’ont donc pas trop d’impact sur le marché et le prix des diamants.»

Tracer les diamants sous sanction

Le marché des pierres de couleur est en hausse, et permet de meilleures marges que les diamants bruts (DR)

Mais comment, dès lors, être sûr que le diamant acheté n’est pas un diamant Alrosa qui sera passé par un pays tiers n’appliquant pas les sanctions? Elke Berr poursuit: «Il est difficile d’en être sûr, la seule façon est de compter sur son réseau de fournisseurs sérieux qui appliquent les sanctions. La bonne connaissance du réseau de fournisseurs est capitale. Le maître-mot est d’éviter d’essayer de faire de bonnes affaires et d’acheter moins cher. Ces derniers temps circulent sur le marché des lots de diamants vendus à un prix inférieur. Il y a une possibilité que ces derniers contiennent des diamants Alrosa. Il faut absolument savoir qui est le fournisseur de diamants bruts et qui les a taillés. C’est ce que l’on appelle un sightholder, un marchand invité par les grands producteurs à acheter du brut et qui intègre souvent une taillerie. Leur nombre est limité. Par exemple, De Beers se réfère à une centaine de sightholders agréés. C’est une garantie de sécurité pour le marchand. Dans ce cas, la traçabilité est possible.»

Les États-Unis restent les plus gros acheteurs de diamants du monde

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